Les arbres du Potager, un patrimoine vivant
29 octobre 2019
- En nombre de sujets, le patrimoine arboré est de nos jours, comme rappelé ci-dessus, environ une fois et demi à deux fois supérieur à ce qu’il était à l’époque de La Quintinie, mais très inférieur de ce qu’il était à la fin du 19ème siècle et début du 20ème siècle (14 500 arbres fruitiers en 1910). Le gel de deux mois pendant l’hiver 1709-1710 a certainement fait perdre plus de la moitié des arbres fruitiers ainsi que le grand gel de 1879-1880 qui a fait perdre jusqu’à 80% des arbres selon les témoignages. L’histoire du jardin n’est pas linéaire.
- En termes de variétés, Jean-Baptiste de La Quintinie proposait la culture d’environ 70 variétés de poires et seule¬ment 7 variétés de pommes au Potager du Roi. En 1995, le jardin proposait seulement 32 variétés de poires et 39 de pommes, contre 565 variétés de pommes et 309 variétés de poires à la fin du 19ème et début du 20ème siècle, tandis qu’aujourd’hui environ 140 variétés de poires et 160 variétés de pommes sont représentées.
- En proportion, la part de certaines formes a également évolué. La Quintinie ne donnait pas de noms aux formes fruitières autres que générales (« espalier » et « buisson »). Il ne souhaitait pas de « contre espalier » au Potager du Roi (voir commentaires ci-dessus sur les contre-espaliers et armatures en fer forgé du Grand Carré datant du 19ème siècle). L’explosion du nombre de formes fruitières portant des noms spécifiques est principalement un phénomène du milieu du 19ème siècle. Auguste Hardy, jardinier en chef du Potager du Roi à partir de 1848 et premier directeur de l’École nationale supérieure d’horticulture à partir de 1874, introduit massivement les cordons (cordon unilatéral, bilatéral, cordons superposés, …). Les formes complexes, souvent ornementales et de fantaisie, nécessitaient, et nécessiteraient toujours, la sélection de variétés et porte-greffes adaptés combinées à une main d’œuvre abondante et/ou l’utilisation de traitements phytosanitaires par pulvérisation.
Dans un petit guide du Potager publié dans les années 1970 par l’École nationale supérieure d’horticulture, M. Coutanceau, professeur, écrit : « Les formes actuellement employées ne correspondent pas à celles utilisées sous Louis XIV. Il suffit pour s’en rendre compte de regarder les ouvrages de l’époque ou la reproduction photographique installée dans l’entrée de l’École. Aux 17ème et 18ème siècles, les espaliers étaient formés avec des branches charpentières obliques, souvent en forme d’éventail. La direction de ces ramifications était obtenue par fixation au mur au moyen de chiffons et de clous (palissage la loque). Les arbres plantés autour du Grand Carré étaient libres et taillés sévèrement presque comme des charmilles, […]. Les formes actuelles, qui datent du 19ème siècle, sont nées du développement de l’industrie de trèflerie qui a mis à la disposition des arboriculteurs le fil de fer, lequel, avec des supports en nombre réduit, permet d’installer les armatures. De cette invention du fil de fer dérivent les formes les plus utilisées : la palmette Verrier (palmette à branche verticale) et les cordons. Si l’invention du fil de fer a eu des conséquences heureuses sur l’esthétique (ce qui est discuté par certains), il n’est pas de même sur le plan biologique et sur la facilité de la conduite. Ces formes artificielles sont contraintes à la nature et nécessitent des tailles de correction très suivies pour empêcher l’arbre de reprendre ses tendances naturelles. Ces interventions sont coûteuses et demandent une main d’œuvre spécialisée. »
LE JARDIN DUHAMEL DU MONCEAU Rattaché au Potager du Roi en 1699 sous le nom de Clos de perches puis Clos aux asperges, ce jardin était prédestiné à l’accueil d’une aspergeraie. Il a acquis, dès la fin du 18ème siècle, une vocation pédagogique, qui perdure de nos jours. Sur une surface de 1,2 ha, il offre un espace de travail et d’étude généreux. Cette amplitude a permis, au cours de son histoire, d’accueillir une grande diversité de parcelles à vocations très variées. Le jardin Duhamel du Monceau regroupe aujourd’hui un Fruticetum, un pré-verger, la Rocaille, des pépinières, des fruitiers, ainsi que différentes formes de jardinage, dont notamment d’écoles primaires du quartier. Projet général Histoire du lieu L’Arboretum Le Fruticetum Compte-rendu des travaux 2019 Depuis le mois de mars, de nombreuses interventions ont eu lieu et la progression a surtout été marquée par des moments de chantier intégrant des étudiants de première année de l'École nationale supérieure de paysage, stagiaires au Potager du Roi, les jardiniers du site ainsi que des enseignants du département Écologie. La clôture vétuste (piquets, grillage) de l'actuel pré-verger et les piquets de protection des arbres ont été retirés, tandis que le roncier a été fauché. Les tiges sarmenteuses, une fois coupées au croissant, ont été réparties en andains pour être broyées à plusieurs reprises au broyeur à fléaux. Le broyat haché finement permettra d'alimenter les paillages des parcelles des étudiants. L'ancienne bergerie a également été démantelée et le saule marsault à proximité émondé. Les sujets les moins vigoureux des arbres fruitiers utilisés par la formation continue pour la démonstration, situés au nord du pré-verger, ont été retirés car trop contraignants pour l'installation de la clôture du pré-verger. Le pré-verger étant désormais simplifié et désencombré, l'installation de la clôture a pu être amorcée en commençant par les pieux aux extrémités et les pieux intermédiaires, renforcés par des jambes de force, sachant que certains sont destinés à supporter les portails de bois. Les fils de tension entre les pieux, sur lesquels accrocher le grillage, ont été installés début avril. Des crampillons ont été cloués sur chaque piquet intermédiaire et pieu. Le fil inférieur a été le plus difficile à installer car positionné au ras du sol. Une petite tranchée s'est avérée nécessaire pour faciliter son passage et la fixation du grillage fin avril. Le 3 mai dernier sont arrivés les premiers moutons du berger Olivier Marcouyoux pour le pâturage. Enfin, la première quinzaine de juillet, un paillage a pu être installé en prévision de la plantation de la haie (jeunes plants forestiers) à l'automne et hiver 2019-2020. Une épaisse couche de matière organique a été répandue sur le sol et couverte par une bâche tissée sur environ 150 mètres linéaires. Le couvert herbacé occulté sous cet ensemble devrait être digéré par la faune du sol. Nous espérons ainsi trouver au moment de la plantation une terre meuble, nourrie, aérée. Chantier à suivre avec les plantations de l’hiver 2019. |